Décidément, je n’ai pas l’intention de vous lâcher la grappe avec ces œuvres incroyables, d’un autre temps, sorties d’un meuble poussiéreux au fin fond d’un grenier oublié. Encore fallait-il trouver la trappe également pour y accéder, mais vous pouvez compter, chers lecteurs, sur notre équipe de rédacteurs qui ont cette obsession, parfois chevillée au corps, de compléter les discographies et de dénicher les trésors du temps passé. C’est une plus-value de notre webzine, certes, mais aussi un devoir que nous devons à la Musique elle-même, à ce qu’elle nous a apporté, fait surgir en nous, et à ce chemin qu’elle nous a permis de parcourir en nous accompagnant dans tous nos méandres.

GRIEVANCE est l’un de ces groupes connus d’une frange minime de personnes éclatée aux quatre coins du globe. Sans doute vampirisé par le déluge d’autres sorties bien plus convoitées, GRIEVANCE est, semble-t-il, passé entre les mailles du filet. Pourtant, même si le nombre d’interviews et de reviews est inexistant, le groupe, de par son line-up, nous donne quelques indications pas inintéressantes pour recomposer le puzzle. D’abord, disons un mot sur le fait que GRIEVANCE oscille autour de la mouvance du « Christian Black Metal », dont ANTESTOR est un des représentants les plus symboliques. Du reste, notons que, du duo qui compose GRIEVANCE, Robert Bordevik ira tâter de la guitare sur "Omen", le dernier opus d’ANTESTOR… Tiens donc !

Et puis, sur ce "The Phantom Novels", trois invités de marque vont venir pousser la chansonnette ou y contribuer. Vous les connaissez, c’est certain. Si je vous dis Jesper Strømblad et Anders Fridén… en 1999, peut-être me rétorquerez-vous "Colony" d’IN FLAMES… et vous aurez raison. Et le troisième larron, certes plus discret, Pål Espen Johannessen, a été le producteur de COVENANT, puis de THE KOVENANT, du "Mellom Skogkledde Aaser" de KAMPFAR, ainsi que d’autres albums incroyables tels que le "Ode To The Nightsky" de MUNDANUS IMPERIUM, le "Drep De Kristne" de TROLL… mais aussi un claviériste de session talentueux à ses heures sur une bonne partie des albums sus-cités.

Voilà, le décor est planté, mais il est bien temps de passer à cet incroyable "The Phantom Novels", qui nous embarque avec une production bien honorable sur les rives, donc, d’un Unblack Metal volontiers symphonique et endrapé de mélodies très cristallines. Et j’en veux pour preuve et pour témoin les tous premiers titres de l’unique album de ce duo norvégien. Les nappes de claviers sont ici un poil grandiloquentes (dans le bon sens du terme) et vous rappelleront en effet le "Nexus Polaris" de THE KOVENANT à coup sûr. Écoutez pour voir l’opener "Origin In Vain", un titre très convaincant et qui nous embarque le corps et l’esprit dans ses envolées atmosphériques et des lâchers de leads très beaux. Allez vite m’écouter cela ! Et continuez votre délicieuse besogne avec la très belle ballade suivante "Angels Succumb" ou encore la plus tempétueuse composition "The Mask Of Sin", qui, toutes deux, vous rappelleront le "Størmblast" du DIMMU BORGIR de l’époque.

Si l’album possède encore quelques approximations, notamment au travers du chant clair de Robert Bordevik, un poil perfectible, mais qui a aussi cet intérêt manifeste de s’alterner intelligemment avec le chant vociféré du compatriote Kenneth Finndal ou avec celui de Jesper Strømblad sur les tracks "Atrocity Upon Deceptions" et "A Devils Rhyme", "The Phantom Novels" est bluffant d’intérêt à plus d’un tour. Les passages instrumentaux, très narratifs, donnent quelques bribes supplémentaires de matière pour emmener cet album sur des pentes plutôt inexplorées à l’époque (le petit effet psyché sur les claviers de "Craving Path", ainsi que son très beau solo noyé dans les nappes des claviers), tendant à rameuter quelques éléments Prog ou plus Heavy et de les concrétionner à un Black Metal moins hostile qu’il n’y paraît…

Cette chronique est un plaidoyer pour cet album envoûtant, original et beau à la fois. Il n’est pas aisé de trouver ce "The Phantom Novels". Il existe une édition japonaise qui englobe aussi l’EP "Grievance" de 1998, non dénué d’intérêt, mais ne comprenant au final que deux titres intéressants (puisque, des deux autres de l’EP, l’un est une introduction, l’autre la première mouture de "Craving Path"). Dans tous les cas, si vous faites l’acquisition de ce "The Phantom Novels" ou que vous pouvez l’écouter, sachez que vous n’aurez que du bonheur dans vos oreilles. Un bel oublié, certes, mais plus belle encore est sa (re)découverte.