En 1999, Shatraug écrit frénétiquement et souhaite incliner HORNA vers plus d’endiablement et d’enragement. Ce second album, au contenu plus violent encore que ne l’était "Kohti Yhdeksän Nousua" sorti l’année précédente, se dote d’un son plus crude et quasi raw. Moredhel (ndlr : cofondateur de HORNA avec Shatraug), quant à lui, commence, notamment lors de l’enregistrement de l’album, à sentir les limites de sa collaboration au sein de HORNA. Davantage friand d’atmosphères épiques qu’il avait réussi un peu à parsemer au sein du premier album, notamment avec des références à Tolkien, il sent que le lead ne se partage plus tant que cela et se fait une raison. La séparation est inévitable et, passé l’enregistrement, il mettra un terme à ses activités au sein de HORNA pour aller fonder BATTLELORE, dont vous trouverez les nombreuses chroniques de Volthord sur le site.
Nulle guéguerre entre eux cependant, mais seulement une opposition d’idées et de visions du groupe. En tous cas, ce second album est aussi l’un des moins accessibles que Shatraug ait produits. Sorti chez Solistium à 1500 exemplaires, il comporte pas moins de douze titres, dont certains dépassent allègrement les sept minutes. Avec cette production assez rêche et ces guitares un peu en arrière de la scène sonore, "Haudankylmyyden Mailla" n’est pas des plus digestes. Shatraug, d’ailleurs, le confirmera bien plus tard. Pas forcément taillé pour le live, l’album est difficilement défendable à l’époque et trouve un succès encore bien trop discret. Et il est vrai qu’à son écoute, nous pouvons ressentir des pointes de lassitude ou un manque parfois cruel de riffs tueurs. Seule constante indéfectible encore : la voix féroce de Nazgul.
Le sieur monopolise bien l’antenne et, avec une habileté déconcertante, il participe de fait à développer l’aura ténébreuse et les lettres de noblesse du son de HORNA. Et j’inclurai aussi le jeu assez impressionnant du batteur Gorthaur, qui, de mon point de vue, joue dans la même cour qu’un Frost (SATYRICON) de l’époque, avec une variété bien salvatrice. Car, en effet, l’album tourne plutôt en rond du côté des riffs. Il y a bien des titres qui sortent du lot, je pense à "Ylle Kuihtuneen Ajan Ajatusten" et son mid-tempo hypnotique et ses onces de claviers fantomatiques, ou bien encore à "(Kaiken) Kristityn Kuolema", bien plus identifiable que les autres titres. Cette homogénéité des compositions et leur longueur un peu trop importante sont encore un frein à l’expansion de HORNA. Mais cet album est aussi un accouchement de cette furie de compositions et d’idées que développe le Shatraug de l’époque, et en ce sens, il se doit d’être écouté comme une passerelle à emprunter pour comprendre le suivant.
Album charnière, il est, comme je l’aime à le dire, la courte échelle donc pour le disque suivant, qui comprend aussi son lot de surprises mais aussi, hélas, de déceptions (avec une production indéfendable). Nous en reparlerons. Pour l’heure, HORNA, à la sortie de ce "Haudankylmyyden Mailla", continue sur sa lancée et prend part à plusieurs albums split qui conforteront son omniprésence et son identité inquiétante. Ce second album était donc nécessaire et aura permis sans doute d’évacuer des erreurs mais aussi des fulgurances pour affiner la suite.