Pour les amateurs de papier de verre, de soude caustique ou de lames acérées, ce petit EP de HORNA est fait pour vous. Si vous aimez saigner des oreilles, souffrir d’acouphènes causées par des sibilances extrêmes, "Sota" est fait pour vous. Léger entremets entre deux albums, Shatraug produit cet EP en 1999 pour nous effrayer à nouveau l’espace d’une douzaine de minutes. Whoredel, son ancien frère d’armes, n’est plus franchement de la partie. Il rétrograde du côté de la basse et termine son chemin de croix "inversée" au sein de HORNA. "Sota" n’est sans doute pas la plus grande des sorties de HORNA, notamment parce qu’elle ne concentre qu’un seul titre original, qui plus est caché au sein de cet EP, et deux titres principaux tirés du précédent album : "Haudankylmyyden Mailla".

Bien sûr, la production n’est pas la même, d’où mon introduction avec ces risques de saignements possibles. Shatraug, toujours dans une période intense de composition, multiplie les sorties, notamment en collaborant avec d’autres groupes du cru au travers de splits. Tout ne se passe comme prévu, comme quoi, parfois ou souvent (à vous de voir), les labels s’affranchissent des choix des artistes. Voyez plutôt. Le premier split de HORNA, sorti via le label Dark Horizon Records — peu après la sortie de "Sota" — devait s’effectuer avec les Américains de CRUCIFER, Shatraug et sa bande ayant choisi cette collaboration. Mais surprise pour les Finlandais : le label choisira un autre groupe américain, FOG, sans même les prévenir… Drôle de management, pourrait-on dire.

Pour revenir à cet EP bien abrasif, je note cependant qu’hormis les céphalées possibles, le son redore le blason des titres que la production de "Haudankylmyyden Mailla" avait plutôt terni. Les vocaux de Nazgul Von Armageddon (Werwolf, de son autre alias, boss de Werewolf Records, membre fondateur de SATANIC WARMASTER et participant, à cette époque, à PEST, WARLOGHE et à d’autres groupes bien plus tendancieux identitairement parlant) accentuent aussi cette cisaille Lo-Fi et le fuzz glacial et glaçant des guitares. Pour ma part, j’aime la courtesse de cet EP et l’intensité authentique, brute, qu’il dégage.

Avec cette pochette évocatrice, il est certain que nous n’écouterons pas un conte de fées, où de jeunes wokistes en devenir iraient conter fleurette et commuer, cœur avec les mains, avec un public épris d’amour et de vicissitudes vaguement agressives… Non, Shatraug et ses cerbères de l’époque n’auraient pas même imaginé avoir une quelconque prémonition à ce sujet. Leur Black Metal est intense, sauvage, cru et sans compromis. Il n’exprime rien d’autre qu’une vision pugnace, intense, urgente du feu sacré qui bouillonnait en eux. En cette fin de millénaire, la tectonique des plaques perdure encore au sein de HORNA. Shatraug, le leader, est intransigeant et continue sa route coûte que coûte. Un futur album va émerger et rabattre les cartes une dernière fois : "Sudentaival", avant une salve d’EPs intéressants et un line-up stable et légendaire.