À quoi pouvait bien ressembler le groupe au début de ce millénaire ? Disons que les cheveux semblaient plus épais sur les crânes désormais plus éclaircis depuis, et les carcasses de nos Hollandais étaient aussi plus frêles. Mis à part ces banalités que je formule et d’ailleurs très bas de plafond, n’occultons pas que, même si le line-up s’est modifié au fil du temps, Marco Van Der Velde et le bassiste en assurent encore l’assise actuelle. Mais surtout le Doom déjà gothique de THE WOUNDED se cristallisait dans l’envergure de certaines compositions.
Et rien de mieux que de démarrer le voyage par "You Roses Will Burn" avec son ambiance très fin de millénaire. Le son des grattes – assez caractéristique de l’époque – légèrement en arrière du mix laisse la batterie marquer l’offensive en faisant émerger des claviers atmosphériques disparates juste suffisants pour appuyer le timbre de Marco. "We Pass Our Bridal Days" débute aussi d’une façon identique même si ce titre nous fait entrer dans le dur de l’album. Cette fois les guitares sont lourdes de spleen et absorbent la lumière tandis que les claviers, bien moins chastes, cherchent à nous épouvanter. Et ce titre fonctionne à merveille, Marco dépose son jeu vocal avec brio en nous créant de belles émotions toujours sous l’étendard du désespoir et de la fragilité. Les Hollandais de THE WOUNDED arrivent, malgré quelques maladresses et/ou longueurs, à former un écrin sonore précieux et richement mélodique.
Pour un premier album, nos Hollandais n’ont pas ménagé leurs efforts, et se payent même le luxe de reprendre le "Smalltown Boy" de BRONSKI BEAT. Étonnant de proposer cette reprise comme second titre de l’album, mais après réflexion je remarque ou ressens qu’elle constitue le relais entre un premier titre juvénilement plus accessible et "We Pass Our Bridal Days" qui s’endrape d’une mélancolie plus féroce et boueuse ; sans doute ma préférée dans la variété de style que propose ce "The Art Of Grief". J’aime cette lourdeur très doomy, comme sur le titre "Against All Gods". Le son proéminent de la basse et les vocalises désespérées de Marco font le sel de ce titre et fonctionnent à mon sens bien mieux que sur d’autres titres où les approximations nous ennuient un peu. Les tracks "Frailty Thy Name Is Woman" et le bien trop long titre de clôture "In Silence…" font partie de ce lot-là.
Mais bon, j’arrête de cracher dans la soupe car l’album n’est pas si mal que cela surtout si l’on se rappelle que c’est le tout premier, et que d’autres vont suivre avec plus ou moins d’éclats. De plus, remettons-nous dans le contexte et n’oublions pas que la concurrence de l’époque était plutôt rude. Il y avait en effet les ANATHEMA, les KATATONIA, les PARADISE LOST ou bien encore les MY DYING BRIDE, mais c’est plutôt et surtout à NOVEMBRE que je pense. Les Italiens ont eu les mêmes débuts avec des titres très accrocheurs mais emplis de maladresses certaines. Les Hollandais de THE WOUNDED tombent moins dans cet écueil mais avec "The Art Of Grief", le groupe affiche ses ambitions et dévoile que leur aventure est en marche.