C’est quasiment le line-up complet des Autrichiens d’ABIGOR qui entame la bonne mise en marche du projet AMESTIGON, projet bien évidemment signé Napalm Records. Quasiment, oui, car manque Silenius à l’appel, sans doute bien occupé à l’époque de fignoler le "Stronghold" avec Protector. Pour l’heure, en 1998, AMESTIGON est un peu une autre récréation pour toute cette joyeuse bande durablement soudée de par leurs investissements musicaux. "Höllentanz" est le premier EP du groupe, après un split fort intéressant avec les très originaux ANGIZIA, sorti deux ans auparavant, et dont je vous recommande l’écoute. La partie d’AMESTIGON est vraiment intéressante. Les titres tirés des deux premières démos tirent leur épingle du jeu, notamment "Stormlord" et "Samhain", qui, dans leurs élans mélodiques, nous font graviter instantanément sur les débuts prodigieux d’ABIGOR (le riffing possède des similarités flagrantes avec un des titres de "Opus IV", notamment).
Pas étonnant, me direz-vous, lorsque l’on sait la participation dans l’ombre de P.K. (Peter Kubic, le regretté fondateur et maître ès riffs d’ABIGOR, suicidé à la fin de l’été 2024). Plus mid-tempo et hanté que le projet ABIGOR, AMESTIGON conserve une certaine agressivité tout en développant davantage de motifs atmosphériques. T.T. (Thomas Tannenberg), que les adorateurs…, nous fait encore écarquiller les yeux de par son jeu de batterie toujours autant reconnaissable et inspiré. Apparaissant dans le line-up comme un musicien de session, il est pourtant à l’initiative du projet qu’il produit et pour lequel il fit rencontrer Thurizaz et Tharen (ce dernier s’émancipant par ailleurs, à cette époque, au sein de son autre projet bien plus Darkwave que Black Metal, DARGAARD, avec la femme de Thurisaz. Vous suivez toujours ?).
Pour en revenir à ce bel EP, attendez-vous donc à des ambiances plus ténébreuses que courroucées et à des titres plus hypnotiques qu’emportés. Entre du DARKTHRONE et du BURZUM, le tout saupoudré, vous l’aurez compris, d’une sauce ABIGOR-ienne point trop pimentée, "Höllentanz" prodigue ses meilleurs soins pour vous embarquer dans quelques rêveries espiègles. Le titre éponyme est très certainement composé par Peter Kubic, tant il macère dans le bon jus d’un "Nachthymnen"… tandis que, pour la pièce centrale, "Rattenfänger", sépulcrale et vampirique, qui s’étale sur quasiment dix minutes dans des circonvolutions répétées. Sans doute un peu trop longue, ce titre est pourtant très bon, notamment au niveau du placement des vocaux de Tharen, qui ressemblent à s’y méprendre parfois à ceux de Silenius, sans toutefois pouvoir égaler son ingéniosité et sa science du placement.
Les deux derniers titres comportent aussi leur lot d’intérêts. Entre "The Gates To A Red Moon", du même acabit que le titre éponyme (P.K., serait-ce donc encore toi ??), et l’instrumentale "Atmosfear", qui ne fait pas la pub pour le fameux jeu de plateau des années 90, mais conclut bien honorablement le disque, AMESTIGON nous adresse un bel EP, bande-son intéressante d’une cousinade autrichienne assumée et décomplexée. Par la suite, après la sortie de ce "Höllentanz", Thurisaz va quitter le groupe pour aller tester le micro du côté d’ABIGOR, tandis que Silenius le remplacera ! Ce sera également la fin de la collaboration du groupe avec Napalm Records, suivie un an plus tard, en 2001, par… je vous le donne en mille, ABIGOR ! D’autres membres viendront se greffer, donnant de nouvelles colorations à AMESTIGON, détachant progressivement les structures ABIGOR-iennes des compositions et affirmant une identité propre bien plus marquée.
Un peu tapi dans l’ombre, ce projet est pourtant intéressant. Le dernier album en date, "Thier", sorti il y a dix ans, vaut sacrément son pesant de cacahuètes. J’espère et je souhaite qu’un jour, vous y mettiez plus qu’une oreille, si toutefois cela n’est pas déjà fait.