Véritable interlude instrumentale composée en huit chapitres, cet opus sonore sombre se détache de la discographie classique ultra belliqueuse du groupe. Composé par le claviériste Arthur Schkolnik, "Temple Forest" se morfond dans de l’ambiant à tendance Dungeon Synth. Fini les tempos martelant la terre et pilonnant les cieux ! Les vociférations de l’ours ukrainien (Roman Saenko) sont ici reléguées aux oubliettes d’un château sans doute hanté de phénomènes inavouables. Entrons donc puisqu’un clapet semble s’ouvrir, laissant un humide souterrain apparaître… !
Chaque track de cet album agrège une ligne mélodique qu’un clavier lugubre et atmosphérique étale tout du long de sa durée. Le son qui se dégage de cette production est utilement retranscrit dans son plus simple appareil. Nous ne retrouverons rien d’autre que l’audace de jouer avec notre propre imagination mais aussi notre pesant ennui. Car loin s’en faut, l’album ne conviendra pas aux fans hystériques de la bande à Saenko, qui n’y verront qu’une errance instrumentale sans grand intérêt. Malgré l’estime que je porte à la musicalité de HATE FOREST, je n’arrive pas raisonnablement à dédaigner cet album ; mieux, il réussit à exhorter ma pensée. Je le vois comme un album peu accompli dans son essence, mais il me paraît volontiers frondeur et glacial. Glacial car je dois bien me l’avouer, mon imaginaire travaille à son écoute.
J’ai comme l’impression de m’immerger en apnée dans des abysses de plus en plus glacées jusqu’à ressentir en moi comme une forme variée d’ivresse des profondeurs. Certains titres m’y amènent plus que d’autres, je pense par exemple à "Majesty Of The Approaching Forest", "Snow Covers Faded Gold Of Autumn" ou bien encore à "First Rays Of The Rising Sun". Ce jeu funeste du synthétiseur tout au long de ce "Temple Forest" semble stimuler mon désir d’halluciner une histoire cauchemardesque et tragique. Contant les vestiges humains, l’omnipotence des lignes de claviers fait surgir la visite des catacombes d’un château hanté. Chaque morceau serait ce chemin capricieux, angoissant et tourmenté menant nulle part sauf vers la mort ou la nostalgie des souvenirs de vie s’enfuyant.
"Temple Forest" ricoche avec les pièces atmosphériques de BURZUM, comprenez avec des morceaux tels que "Tomhet" pour être plus clair. Cet album d’un peu plus d’une demi-heure n’est pas vain mais digne d’intérêt selon moi. Il a aussi le mérite pour lui de ne pas traîner dans des longueurs déraisonnables ; beaucoup de groupes de Black Metal Ambient n’ont pas cette sobriété ni cette humilité, nombre d’entre eux accouchent de pièces soporifiques sans sourciller. Les quatre premiers titres sont supérieurs aux quatre suivants, laissant un léger déséquilibre poindre, même si "Cold Early Morning Mist" relance quelque peu la fin de l’album. Enregistré en 2000, en même temps que la démo "The Curse", "Temple Forest" est aussi l’un des germes sur lesquels HATE FOREST éclora. Si vous appréciez le Dungeon Synth et ses ambiances épico-médiévales, "Temple Forest" pourrait servir votre esprit d’un peu plus d’imaginaire et d’intranquillité. À votre bon cœur, si je puis dire !