C’est sûr que cet ultime album des Tchèques de MANIAC BUTCHER ne fera pas plaisir au prude lectorat de notre webzine, aux vieux bikers fans de vieux groupes, de réclames sonores de donjons et dragons patentés, et cela me ravit à plus d’un tour. Ces derniers vont pouvoir cracher dans la gueule et dénigrer le duo composé par les fidèles Barabarud Hrom et Vlad Blasphemer, avant d’aller se faire sonder les fesses pour prévoir leur prochaine incontinence… cela sera déjà ça de moins à évacuer de leur conscience. "Masakr" clôt dix-huit années de non-concession aux sirènes de la mélodie, aux embrassades des claviers ou aux ambiances vocales sirupeuses et enchanteresses. MANIAC BUTCHER aura été fidèle à ses principes fondateurs et à ses choix intransigeants.
Déclinant les offres de certains labels, les Tchèques que l’on croyait éteints pour de bon depuis la sortie en forme d’épilogue en 2000 de leur album "Epitaph – The Final Onslaught Of Maniac Butcher", finalement reviennent pour un ultime assaut, dix ans plus tard, avec ce septième opus sacrément velu une nouvelle fois. Avec une production étonnamment plus propre, le duo historique s’est acoquiné avec une nouvelle garde qui aiguise déjà leurs couteaux. Un nouveau batteur et un guitariste viennent s’agréger dans ce "Masakr" pour soigner leurs gammes et aller s’envoler par la suite, la férocité dans le cœur, au sein de CULT OF FIRE. Avec ce "Masakr", MANIAC BUTCHER a raccourci un brin la durée de ses compositions, l’album ne dépasse pas les trente minutes mais l’intensité reste de mise.
Beaucoup plus lisible, cet ultime album est également le plus accessible de tous. Ne toussotez pas pour autant, les Tchèques, s’ils ont affiné leurs riffs, n’ont pas décidé d’arrondir les entournures de leurs agapes vénéneuses et féroces, mais avec un sens encore plus accru pour une ambiance plus prenante et directe, MANIAC BUTCHER gâte son auditoire. Car, s’il est vrai que les Tchèques ont rarement soigné le son de leurs albums, celui de "Masakr" fait éclater au grand jour moult détails bien appréciables qui nous permettent notamment de prendre la mesure du travail besogneux, précis et complexe des compositions. Dix ans après "Epitaph – The Final Onslaught Of Maniac Butcher", la voix dérangeante et acidement acrimonieuse de Barbarud Hrom se révèle également sous son aspect le plus ténébreux. Fidèles à leur mantra : "No keyboards! No female vocals! Only pure black metal storms!", les Tchèques de MANIAC BUTCHER se révèlent également bien plus portés sur le développement de motifs mélodiques, surtout si l’on compare "Masakr" aux précédents albums.
Écoutez par exemple les trois derniers titres de l’album (je vous épargne leur citation), pour vous convaincre non pas de ce tournant mais de ce son plus texturé, délibérément choisi, de ces compositions plus abouties, et de cette production bien claire et nette fort appréciable. Avec ce "Masakr", MANIAC BUTCHER s’éloigne du Lo-Fi et du Raw qui l’avaient tant caractérisé à ses débuts, sans toutefois tourner le dos à cette bestialité crasse et son ambiance très « première vague » du Black Metal qu’ils ont toujours colporté. C’est mal connaître l’extrême congruence et l’éthique forte qui ont toujours animé ce groupe. MANIAC BUTCHER ne reniera jamais ce qui le porte, ainsi que les convictions fortes qu’ils ont toujours brandies haut et fort comme des valeurs inébranlables.
Le Black Metal n’a jamais été pour Vlad Blasphemer et Barbarud Hrom un unique courant musical, mais bien un style de vie et une manière d’être. En écrivant leurs textes en tchèque ancien et en décrivant les légendes oubliées de leur patrie tout en les mêlant de sentiments personnels, MANIAC BUTCHER aura marqué son temps, aura frappé les esprits et personne ne pourra contester l’aspect culte et précurseur des Tchèques au sein de leur pays mais également au-delà de leurs frontières. Ces deux-là avaient déjà fomenté les débuts de leur collaboration en 1987, c’est vous dire, cela date ! Il était donc temps qu’ils reçoivent les honneurs et qu’ils soient couronnés en dernier lieu par le plus bel album qu’ils aient créé. Pensées à toi, Vlad Blasphemer, là où tu gis et… Hail !