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Korgonthurus - Vuohen Siunaus
Chronique par Storm - Publiée le 29/11/2025
Korgonthurus - Vuohen Siunaus
Note : 5/6
Genre : Black Metal
Année : 2016
Label : Woodcut Records
Pays : Finlande
Durée : 48:28
Tracklist :
1.
Kaaos
04:58
2.
Puhdistuksen tulet
05:55
3.
I.K.P.N
06:45
4.
Vuohen siunaus
05:10
5.
Inho
04:33
6.
Ihmisyyden raunioilla
06:48
7.
L.U.X.
14:19

À l’écoute de ce "Vuohen Siunaus", il y a de quoi se sentir déchiqueté par les vocaux teigneux, possédés, épouvantables de Corvus, tant leur grain maléfique terrifie et dissout toute âme qui vive dès les premières secondes de cette soufflante sonore. Après moult rebondissements au sein du groupe, KORGONTHURUS livre son deuxième méfait – l’un des plus aboutis de la scène orthodoxe finlandaise des années 2010 – avec un line-up stable et galvanisé. Kryth, membre fondateur, est impérial derrière ses fûts, tandis que serpentent les riffs tant acérés que tranchants du sieur Corvus, devenu depuis lors un des compositeurs ès sciences du Black Metal finlandais. "Marras", l’album précédent et premier du nom, datait de 2009 et proposait deux longs titres bien différents, avec des rythmes plus en mid-tempo et des atmosphères plus hypnotiques qu’acrimonieuses.

Véritable laboratoire noir, KORGONTHURUS s’est hissé aujourd’hui – et cet album y est pour beaucoup – au niveau des autres têtes de pont de la scène finlandaise (HORNA, BEHEXEN, SARGEIST, ALGHAZANTH). Mais les dés étaient déjà joués. Corvus, à l’instar de Shatraug, fait partie de ces leaders charismatiques et prolifiques qui ont creusé inconsciemment un sillon durable et ont forgé l’identité, le style et le son si abrasif de ce Black Metal inimitable : la production volontiers rugueuse, l’âpreté glaciale des ambiances, l’acharnement sauvage et triomphant de ces assauts mélodiques. KORGONTHURUS se différencie néanmoins par son jeu plus chaotique et tourmenté, son esthétique plus sale et décharnée, son approche plus « raw ».

Des titres tels que "Puhdistuksen Tulet" vont vous enserrer le cœur tant la haine des ambiances s’endrape d’une mélancolie tenace. Les effets de voix rocailleuse de Corvus font leur petit effet : ils galbent cette tristesse de fond et me rappellent certains passages du "Opus IV" d’ABIGOR où Silenius s’amusait souvent à cerner cet occultisme atmosphérique par quelques diableries vocales similaires. Concernant cet album, il se raconte que Corvus est allé très loin lors des sessions d’enregistrement dans l’éraillement de sa voix, la portant jusqu’à la rupture. Du reste, nous en avons la preuve et l’échantillon, puisque le groupe a décidé de conserver ces parties vocales extrêmes. Écoutez donc le titre "I.K.P.N" pour entendre ce jusqu’au-boutisme vocal et vous faire une idée de la motivation du sieur. KORGONTHURUS, en tout cas, démontre avec ce "Vuohen Siunaus" l’imposant travail des compositions, passant ainsi du statut de culte underground à celui de groupe incontournable de la scène finnoise.

D’une manière générale, les titres de ce second album vont alterner entre sauvagerie nihiliste blastée et tempo hypnotique foncièrement mélancolique et désenchanté. Autant j’apprécie cette douce barbarie, toujours savoureuse et inspirée (les riffs ont sacrément du chien), autant je préfère le rendu émotionnel des titres moins « brutaux ». Notamment, par exemple, "Ihmisyyden Raunioilla", avec ces cassures de rythme, cette lancinance empoisonnée, envenimée, somptueusement hantée par les vocaux hirsutes de Corvus ; ou bien encore le démonstratif "L.U.X", clôturant l’album, qui, du haut de ses quatorze minutes et quelques, nous fait apprécier tout le jeu de Kryth derrière les fûts et la belle percussion des riffs généreusement dotés de sentiments profonds.

Pour tout dire, cet album est une réussite et demeure le point de bascule de KORGONTHURUS. À ce jour, il reste le plus incroyable de la discographie et se range, bien en évidence, aux côtés du "Fist Of The Northern Destroyer" de CLANDESTINE BLAZE, du "Sanojesi Äärelle" de HORNA, du "Let The Devil In" de SARGEIST, ou encore du "By The Blessing Of Satan" de BEHEXEN.

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