Écouter un album de REVENGE ne peut avoir qu’un dessein : celui d’expulser, de jeter au-dehors le trop-plein, de purger la haine de concert avec James Read, qui est passé maître dans l’art de purifier la violence, d’en extraire le sérum venimeux pour en contaminer la planète. Écouter "Strike.Smother.Dehumanize", c’est regarder excité une attaque au gaz sarin les mains dans le froc. James Read est un obsessionnel de la pire des espèces : celle des salopards patentés et bien ritualisés. Les pochettes sont toujours de la même veine et ont une charte graphique scrupuleusement identique, avec au moins un crâne ou parfois un objet tranchant. Les titres sont composés de trois mots, toujours très enclins à la bienveillance et au partage altruiste, vous imaginez bien. Bref, du REVENGE, quoi !
Cela fait un paquet d’années, d’ailleurs, que le bougre James mène sa barque tout seul (depuis 2011, pour être exact). Il fut un temps où Peter Helmkamp (ANGELCORPSE) avait trouvé une seconde jeunesse pour aller torturer ses lignes de basse sous les coups de butoir des riffs acérés du Canadien. La raison de son départ est inconnue, mais il se dit que James lui aurait proposé de partager un bain d’acide pour tenter d’y faire un remake de "Scarface". Désormais, James Read nous maltraite, comme à l’accoutumée, de son agressivité dissolvante, de son haleine acrimonieuse, de ses grunts barbares et grognant comme une armée de molosses basseux affamés. Ce War Metal est vraiment dérangeant pour la morale et la conscience. Y trouver du plaisir est vraiment questionnant.
La bonne demi-heure de ce sixième album va pourtant passer étrangement vite. Ce tord-boyaux musical de l’enfer n’est pourtant jamais ignoble ni agaçant. Si les titres restent foncièrement homogènes et répondent un peu tous au même cahier des charges, leurs crudités ont ce côté très direct qui fait de suite tressauter les neurones. La puissance et l’énergie débordante contenues par les riffs et les rythmes assassins ont ce côté Punk vicelard ou Grindcore malsain. J’ai un faible, néanmoins, pour certains titres. "Oath Violator" est sans doute celui que je préfère, avec ces breaks de dingue et son solo dégueulasse schlinguant la mort. J’aime beaucoup aussi "Self Segregation (System Torched)", qui me rappelle pas mal le NASUM de la bonne époque, ou la très brève "Excommunication", qui contient ce côté entraînant et mauvais fouetteur sous tous rapports.
Chroniquer un album de REVENGE n’est pas une mince affaire, mais une fois l’album passé, il n’est pas honteux d’avoir envie de se le repasser d’une traite. N’écouter qu’un titre n’est pas foncièrement la chose à faire. Cela pourrait s’apparenter à boire un unique shot. Forcément, la décharge produite en demande d’autres. Pour toutes ces raisons, je juge un album de REVENGE réussi, si et seulement si ma rage s’est exprimée et qu’une certaine forme de sérénité prend le dessus. REVENGE est à conseiller pour tous les mous du cul de la planète, ou à ceux qui auraient tendance à plier le genou et qui, pas encore trop meurtris ou impactés, sont bien décidés à s’en tirer par la grande porte.