Ethereal Shroud - Trisagion
Chronique par Storm - Publiée le 06/12/2025
Ethereal Shroud - Trisagion
Note : 5/6
Genre : Funeral Doom/Depressive Black Metal
Année : 2021
Label : Autoproduction
Pays : Royaume-Uni
Durée : 01:04:15
Tracklist :
1.
Chasmal Fires
27:47
2.
Discarnate
13:54
3.
Astral Mariner
22:34

Le Black Metal est vraiment passionnant, il mue sans vergogne et crée de nouveaux biotopes de pensées, habite des atmosphères denses et profondes, relate l’extrême du règne des vivants sous toutes les coutures. Là où des groupes s’enlisent ou ressortent la même dinette, d’autres jouent les explorateurs en établissant de nouvelles voies ou les alchimistes en concoctant de nouvelles formules. Je pense notamment au dernier DØDHEIMSGARD qui, preuve à l’appui, parcourt des territoires inconnus, emmenant dans les valises un Black Metal chamboulé. Ces albums sortent de l’ornière, découpent à la serpe les dernières moissons musicales, créent une nouvelle jachère permettant à l’auguste nature de reprendre ses droits. Le Black Metal a ça dans le corps, plus particulièrement dans les tripes et cette musique les éviscère pour qu’à nouveau la substance se reforme. Cette hydre de Lerne, cette Médusa dévorent la chair, consument l’esprit, convoquent les émotions instinctives et instinctuelles à se laisser surprendre et guider aveuglément.

ETHEREAL SHROUD siège sur un espace d’ambiances mirifiques et d’une densité telle que cette dernière happe, étreint et tord l’âme de l’auditeur. Nous sommes en présence d’un onemanband génial qui peut se targuer de sortir un petit chef-d’œuvre. Les morceaux sont longs, "Chasmal Fires" par exemple s’étire sur plus de 27 minutes, cela pourrait en refroidir un bon nombre, mais le contenu est tellement intelligent et savamment pensé, qu’il compose une histoire chapitrée dont le fil rouge et l’intrigue sont tenus dans un voyage permanent vers des latitudes plus ou moins clémentes. Car des accords majeurs apparaissent dans les trémolos, les mélodies ne sont pas foncièrement mélancoliques, ce mélange prodigue un agrégat somptueusement beau et profond mais aussi à la fois sépulcral et lumineux. C’est tout l’art que Joe Hawker a instillé dans ce "Trisagion", un mélange ingénieux de Doom et de Black Metal atmosphérique, la lourdeur épique de l’un s’illuminant par la clarté d’aigus de l’autre.

Ce cocktail s’épaissit et atteint la canopée sur le brillantissime "Lanterns" qui entraîne et fait évoluer le titre sur un versant lumineux, un adret alpin. La majestuosité du riffing est complétée et portée par des claviers volontiers épiques, qui donnent de l’attrait à cette composition juste admirable. Cette piste est le bonus track de l’album qui devait ne contenir que les trois autres et qui est présente sur l’édition limitée. "Trisagion" est d’ailleurs articulée autour de ses trois premières tracks, le terme définissant une triple acclamation liturgique où le mot saint est déclamé trois fois. Nous retrouvons la quête mystique de l’auteur transpirant à grosses gouttes dans les lyrics de l’album. L’album est donc une œuvre inspirée traçant un vecteur d’une partie de la trajectoire de vie de son auteur.

Le travail introspectif de l’album se perçoit rapidement, la part belle est concentrée autour d’éléments mélodiques qui s’étirent, non pas en longueur mais en langueur (pardon du jeu de mots !). En effet, la critique que l’on peut effectuer de l’album est son manque d’agressivité même si le chant indubitablement la concentre. "Trisagion" est un album qui se bonifie à chaque écoute, il ne s’apprécie pas en one-shot, mais son écoute marque rapidement. La parenthèse enchantée de ETHEREAL SHROUD semble être arrêtée puisque l’auteur a mis fin aux activités de cette émanation pour se concentrer sur d’autres projets. Gageons qu’il sera autant inspiré et qu’il produira d’aussi belles réussites qu’avec ETHEREAL SHROUD.

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