Parfois, une pochette intrigante engage une écoute et donne le ton de par son esthétisme. Celle de ANCESTRAL BLOOD m’a produit ces deux effets. Encourageant mon imagination, cette dernière a travaillé dans mon esprit. Son côté fantastique, avec ce monstre tout droit sorti de la mythologie grecque, renforce ma curiosité : où diable ont-ils aventuré leur barque, ceux-là ? Sont-ce de fiers guerriers qui doivent se frayer un passage ? Sont-ce des naufragés dont la dernière cause semble perdue ? L’album raconterait-il cette épopée laborieuse, somme toute glorieuse et épique à la fois ? J’ai, en tout cas, avant écoute, fomenté cet espoir.
Sortant des limbes seulement depuis quelques années – le groupe ayant pourtant été créé avant les années 2000 –, Verigo, son maître d’œuvre (qui officie aussi chez nos amis de VESTERIAN notamment), saisit rapidement son auditeur en l’encerclant de mélodies très Viking sur l’introduction "Forged In The Fires Of Hephaestos", qui, en effet, fait penser peu ou prou à WINDIR période "1184". Le groupe cite son influence, et c’est tout à son honneur. Derrière cet album symphonique et mélodique à la fois, je perçois un travail prégnant autour des harmonies qui virevoltent de manière très aérée dans les oreilles et, dès la première écoute, une certaine forme de ravissement opère rapidement. Les titres condensent totalement le conte chapitré d’une aventure guerrière avec ses atermoiements et ses revirements. Sur le titre virtuose "Sky Fortress Of Wizardry", je ressens cette diction infernale d’une histoire qui revit et se désagrège à la fois dans les leads transperçants et spatialisés, et les claviers atmosphériques.
Le travail harmonique ainsi créé donne une certaine forme éthérée à la matière de l’album. Invariablement, je ressens beaucoup de plaisir à l’écoute de l’ensemble de l’album. Les lignes mélodiques sont enivrantes et permettent à ce Black Metal d’être accessible et captivant. Circe, la chanteuse aux commandes des vociférations, entraîne tout ce beau monde de manière exemplaire. Son chant déchiré colle à l’ambiance et sonne suffisamment juste. Je suis moins fan du timbre à la Dani Filth qu’elle adopte sur le titre "Crystallized Within The Caverns Of Time", mais, d’une manière générale, son jeu est enchanteur. Je me dois de vous citer la superbe track "The Cronos Stone", avec ses trémolos hallucinés et son solo mélancolique qui se doit d’être attentivement écouté.
Les claviers se taillent une belle part du gâteau sur cet album et diffusent une forme d’envoûtement. Inspirés, ils ne vampirisent pas le reste, mais potentialisent justement le côté épique et rêveur. La production est claire et ample, la scène sonore est assez large et profonde, permettant ainsi à nombre de nuances et de détails de s’entendre. Pour s’en rendre compte, rien de mieux que d’écouter religieusement les quasi quinze minutes splendides de "Lost On A Boundless Journey (Voyage)". Le titre parle de lui-même et clôt cette rageuse épopée, cette navigation fébrile d’une embarcation toujours plus grinçante et qui tendrait à se disloquer, peut-être, détruisant ou libérant enfin ces courageux voyageurs. ANCESTRAL BLOOD est à surveiller, car ce premier effort est prometteur et original. Si l’horizon se dégage enfin pour lui, je gage de belles réussites et toute votre attention pour le futur chapitre 2.