Je me souviens bien de cette pochette dans un des premiers Metallian français de l’époque et, à l’instar du "Lead Us Into Darkness" de DEMONIC, de mon besoin crépusculaire un jour de l’écouter pour observer ses tripes. D’ailleurs, si Necropolis Records ne l’a pas distribué convenablement, eh bien, si je me réfère à un de mes anciens catalogues VPC d’Adipocere Records (les fameux !), je le vois pourtant bien référencé et stabiloté par mes soins – preuve que j’avais déjà à l’époque eu quelques désirs de me le procurer si j’avais eu plus de fric – et accessible moyennant 82 francs, je vous prie.
Sorti en 1994, mais enregistré l’année d’avant, les compositions de ce "The Priest Of Satan" ont cette saveur diabolique du True Black Metal, légion à cette période. Avec un son bien rêche, cru et froid, THE BLACK nous confirme son parti pris esthétique sans concessions ni autres vaines tentatives de plaire aux auditeurs non initiés. Il faut prendre ce son comme il se doit. Il participe aussi à cette ambiance belliqueuse, diabolique et exigeante. Sans cette atmosphère infernale et inconfortable, nul Black Metal, je dirais – du moins pour ce que ce style produisait à cette période.
Formé au tout début des années 90 par un certain Rietas qui, quelques années plus tard, enfantera DISSECTION (salut à toi Nödtveidt), mais aussi œuvre de jeunesse de Make Pesonen (aka The Black) qui, quant à lui, formera l’excellentissime groupe de Dark Ambient martial et féroce KARJALAN SISSIT (écoutez-moi donc les brûlots que sont "Karjalasta Kajahtaa" et "Tanssit On Loppu Nyt" au passage !), et de Leviathan, qui se contentera de son activité avec THE BLACK, les Suédois instillent avec "The Priest Of Satan" un premier album vil mais bien audible. Objet un peu culte qui ne renversera certainement pas la table, ce méfait fait tout de même partie de l’histoire du Black, non pas dans ses premiers pas hésitants, mais bien dans son ascension folle.
L’aspect mélodique est ténu – à l’instar d’un DARKTHRONE – mais l’irascibilité des vocaux de Nödtveidt fait déjà mouche, avec un jeu bien imprégné de diablerie. Les quelques nappes de claviers éparses apportent un peu de lumière noire aux compositions grisailleuses ("The Black Opal Eye", "Lady Lilith"), mais c’est bien la primeur crasse du riffing qui nous embarque près des flammes sortant des portes de l’Enfer. "The Priest Of Satan" souffre certes de titres à couper le souffle, mais il nous propose méthodiquement de la crudité en entrée, du souffle chaud et infernal en plat de résistance – pas de dessert, il manquerait plus que cela – mais une visite courtoise du Pandémonium en guise de promenade digestive.
Vous savez à quoi vous en tenir maintenant. Les amateurs du Black Metal du début de la seconde vague en auront pour leur frais, les adorateurs de MAYHEM et DARKTHRONE seront repus, et les fans des œuvres de Nödtveidt y trouveront aussi de quoi y prolonger leur adoration ou leur culte. THE BLACK proposera en 2008 un second album, "Alongside Death", en réunissant notamment deux membres de VINTERLAND. À vrai dire, j’ai été moins convaincu, l’album est plus brutal et ne distille pas d’ambiance particulière. Je vous conseille plutôt de jeter votre dévolu sur cette première œuvre initiatique, qui n’est pas un détail de l’histoire du Black Metal. Bien avant le déluge des sorties post-1996, lorsque les albums se comptaient aisément sur les doigts de quelques mains, THE BLACK nous livrait son offrande glaçante.