En vous parlant récemment de l’ovni "In Harmony With The Universe" de MUSSORGSKI, initié par le prolifique Khorzon en 1995, voilà que je me lance à vous parler de son projet d’envergure ARKONA (à ne pas confondre avec le groupe homonyme russe de Pagan/Folk), et de son premier méfait assez exceptionnel qui m’a toujours assez scotché : "Imperium" sorti en 1996. Je vous avais parlé l’année dernière du brûlot "Stella Pandora" que j’avais même affiché en sélection du site pour mieux médailler ce groupe à la discographie exemplaire que couronne plus de trente ans d’existence. Pour revenir à ce premier album au sein de l’entité ARKONA initié en 1993, nous retrouvons en bonne place tout le line-up de MUSSORGSKI dont son chanteur émérite, décédé en 2017 : Messiah.
"Imperium" est un album impérial, pardonnez-moi ce jeu de mots mais ARKONA le mérite amplement et force le respect tant cette première pierre à l’édifice discographique du groupe est flamboyante et solide à tous points de vue. Du côté des ambiances et des mélodies trouvées, les compositions sont exemplaires. D’abord, le chant de Messiah convainc de par son phrasé agressif slave et vitupérant. Son timbre sied parfaitement à ce Black Metal plutôt obscurément hypnotique où des nappes de claviers fantomatiques font régulièrement des apparitions remarquées. Le fuzz des guitares est marqué et nous confronte à cette lente mais immuable progression des ambiances crépusculaires. En se frayant un chemin entre bellicosité et lugubrité, des titres de "Imperium" sortent leur épingle du jeu.
"Epidemia Rozczarowania I Nedza Duchowa" (="Epidémie de désillusion et de misère spirituelle"), pourrait-être ce titre évocateur maniant avec brio l’art puissant du Black Metal entre aimantation maléfique et dissipation de lumière. "Jesienne Cienie Czekajace Na Kolejna Reinkarnacje" (= "Ombres d'automne attendant la prochaine réincarnation") est aussi ce titre assez sublime qui, avec ses breaks ingénieux, ses nappes discrètes, et toujours la diction démoniaque de Messiah, nous aventure sur un terrain plus atmosphérique que guerrier. Et j’aimerai aussi vous évoquer le premier titre de l’album, "Skrajna Nienawisc Egoistycznej Egzystencji" qui, plus trépidant encore que les autres, nous cingle de sa mélancolie bien attisée par une présence plus importante des claviers.
Un premier album vraiment bon qui, en le mettant en perspective avec l’année de sa sortie, nous permet d’entrevoir un groupe et un leader (Khorzon) bien inspiré et mature techniquement, et atmosphériquement parlant. Sa production originelle un poil Raw pourrait vous réfréner. Je vous conseille d’écouter la réédition faite par Hellfire Records en 2013 qui, tout en respectant les compositions et l’ambiance du premier pressage, permet d’enlever ce voile un peu trop ténébreux qui ne permettait pas de profiter de toute la technicité de l’ensemble des musiciens. ARKONA est bien trop méconnu à mon sens. Je ne sais pas encore si j’aurai tout à fait le courage de compléter la discographie complète, mais je souhaitais au moins attirer votre attention avec ce très bel "Imperium".