Et voilà encore un album du temps passé, culte, unique et toujours autant adulé. Quoi de plus normal quand le Black Metal qu’il produit gronde, tonne et traîne l’âme derrière lui. Pourtant, KVIST n’adresse pas à la face du monde un album enjôleur et des plus faciles d’écoute, car fort heureusement, à l’instar d’un ANCALAGON, les aspects épiques sont tout à la fois bruts de décoffrage et envoûtés.
Si vous appréciez les albums contemporains à "For Kunsten Må Vi Evig Vike", les premiers efforts de SATYRICON, de AETERNUS, de JUDAS ISCARIOT, ou bien de GEHENNA, vous serez servis et contentés. En cette somptueuse et lugubre année 96, année de tous les exploits pour le Black Metal, notamment norvégien, KVIST déploie le sien dans l’inconnu et le mystère avec des emportements contenus et surtout désemparants de précision. Et s’il conserve son aura, c’est bien que cet album reste surprenant à bien des égards. Mélodique à souhait, son ambiance sombre semble désosser et suriner les esprits au fur et à mesure que progressent ces longs titres. Le duo basse/batterie exulte et renforce les aspects ténébreux de l’album, que des riffs de guitare un peu en arrière-plan et des nappes de claviers subtiles et discrètes animent tout au long de ces 37 minutes. Le chant de corbeau de Tom Hagen maintient cette tension acerbe et pure.
KVIST a frappé fort, et une seule fois, mais "For Kunsten Må Vi Evig Vike" embrassera la postérité. Noir, épaissement sombre et violent, les six titres qu’il propose ont cet éclat éternel, notamment les dix minutes maléfiques et embarrassantes de "Min Lekam Er Meg Blott En Byrde". Que les créatures des forêts sombres, des paysages inhospitaliers et des vents aigris se rassurent : "For Kunsten Må Vi Evig Vike" tintera toujours sa diablerie aux confins du temps et de l’espace.